Bonjour,
Un collègue (JC, 53 ans) de mon Entreprise s'est suicidé chez lui le 30 Mars dernier en laissant une feuille blanche pour explication de son geste.
Ce Collègue a fait part à tous se proches, pendant de longues années des difficultées qu'il avait rencontré lors des précédents plans sociaux dans les années 80 et 90.
Il avait conservé une fragilité grande sur le sujet, fragilité que nous ne comprenons tous qu'a postériori malheureusement.
Depuis 6 mois des mouvements de réorganisation et de suppression de poste ont touché ses collègues proches, ce qui l'angoissait beaucoup.
Il disait à qui voulait l'entendre qu'il serait le 4ème de l'équipe à avoir son poste supprimé bientôt, ce que lui confirma son hiérachique le 10 Mars dernier.
Il a ensuite montré des signes d'angoisse forte et m'a déclaré quelques jours avant son geste " Je pète les plombs, je vais me retrouver à la rue et au RMI car je serai dans le prochain plan social".
Ce disours incohérent ne m'a malheureusement pas suffisament alerté.
Ses ayants droit sont ses parents, des personnes agées qui ne souhaitent pas entamer de procédure.
L'entreprise est en train de décliner toute initiative de démarche de déclaration et de reconaissance de responsabilité.
La question : En l'absence d'action de l'Entreprise, de la médecine du travail, et des ayants-droits, le CHSCT a-til compétence pour agir auprès de la CPAM/CRAM en déclaration afin qu'une enquête en bonne et due forme soit menée par la CRAM et chez l'employeur.?
L'objectif étant bien entendu la reconnaissance d'une part de responsabilité de l'employeur dans la cause du suicide, en conséquence de la non prise en compte de la fragilité de la personne lors de l'annonce de la suppression de poste,.
Cet objectif a un but de réelle prévention qui ne sera efficace qu'après prise en compte de la réalité des problèmes et des risques engendrées chez certaines personnes par les réorganisations sauvages.
Bonjour,
A priori, le CHSCT n'a pas intérêt à agir devant la CPAM ou le TASS, sur la question de la reconnaissance du suicide en AT.
En revanche il dispose du droit d'alerte s'il estime que ce geste désespéré est le résultat d'une situation de danger grave dans l'entreprise. Il peut également, au cours de la procédure d'alerte et de la réunion du CHSCT, recourir à un expert agréé en hygiène sécurité pour le mandater sur le risque psychosocial. Le rapport de l'expert pourra peut-être convaincre les ayants droits (parents) d'agir...
Enfin, possibilité de saisir l'inspecteur du travail (fin de procédure d'alerte en cas de désaccord avec l'employeur...). Il pourra faire une enquête sur les faits.... Ce type d'affaire est cependant très délicat... Difficile de conclure à l'unicausalité du suicide et par voie de conséquence, à la responsabilité de l'employeur...
Bon courage et soyez forts (attention aux gestes répliques, fréquents dans ce genre de situations)...
Merci pour votre réponse claire et prècise au sujet de la compétence du CHSCT.
Si je n'abuse pas de vos précieux conseils, j'ai également un doute sur la compétence du Médecin du travail dans cette affaire qui se déclare privé de tout moyen d'action hors CHS.
En effet, le médecin du travail me dit qu'il ne lui est pas possible d'initier une procédure d'Accident du travail aupès de la CRAM sans la volonté de l'employeur; que toute autre démarche directe n'est pas possible sans la demande des ayants droits.
Le médecin ayant déja initié des actions de prévention de risques liès au stress aux conditions de travail et au mal-être dans l'entreprise, avec le CHS, et ayant reçu et suivi toute l'équipe concernée par les restructurations/réorganisations sauvages ne peut-il pas initier une action en tant que médecin auprès de la CRAM ?
Je lui ai demandé à minima de faire un courrier à la CRAM, laquelle pourra ensuite,en étant informée, renvoyer en réponse à l'employeur la possibilité qu'a celui-ci d'agir.
Cette démarche nous permettrait de connaitre clairement le refus de l'employeur d'agir, le refus de l'Employeur de reconnaitre par là sa responsabilité, malgré des déclarations internes actuelles alambiquées, en amont de toute action de la famille qui peut intervenir, m'a-t-on dit dans les 2 ans.
Le risque de gestes répliques dont vous parlez et bien ce qui me(nous) motive à rechercher rapidement des actions les plus adéquates possibles, sans oublier
aucune porte possible.
Encore merci pour vos réponses et conseils, et si vous avez un commentaire à rajouter sur l'éventuel courrier du médecin à la CRAM, il sera le bienvenu.
Cordialement
Bonjour,
Le médecin du travail reste bien sûr un acteur indépendant (de l'employeur, des institutions représentatives du personnel, des salariés) dont la mission essentiellement préventive, vise à éviter tout risque d'altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail (art. L4622-3 du code du travail).
Mais il a la possibilité de proposer des mesures de prévention.
Pour autant, si le médecin du travail a la possibilité - comme tout médecin - de déclarer une maladie professionnelle, il ne peut, en effet, déclarer un AT.
C'est au salarié d'informer l'employeur de l'AT et l'employeur doit le déclarer à la CPAM.
En revanche si le médecin n'a pas de contact avec la CPAM, il a en revanche des relations privilégiés avec l'agent de prévention de la CRAM (sui siège lui aussi au CHSCT).
Or sur le risque psychosocial, il existe une brochure INRS qui prévoit de croiser le regard de l'agent de prévention CRAM et du médecin du travail.
PAr ailleurs, le médecin du travail est tenu de rédiger une fiche d'entreprise qui recense l'ensemble des risques qu'il a identifiés pour la santé des travailleurs. S'il a conduit des actions sur le thème du stress, ce point doit être mentionné dans sa fiche...
Il me semble néanmoins que la procédure d'alerte CHSCT couplée avec un recours à l'expert, est la mieux adaptée ...
Cordialement